Préparation d’une rando longue en kayak : conseils et liste (Norvège)

Préparation d’une rando longue en kayak : conseils et liste (Norvège)

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Préparation d’une rando par Patrick Lemoine

Article paru dans le bulletin CK/mer n° 110
Juin 2006, pages 25 à 27

Suivi par le récit de la randonnée en Norvège

Patrick Lemoine nous livre de précieux conseils pour se lancer dans une rando longue en kayak de mer : choix de la destination, préparatiion et listes. Y’a plus qu’à…

Le choix d’une destination

Chaque année, dès le premier jour de vacances, j’aime me précipiter dans un ferry qui m’emmènera vers des contrées, pas toujours lointaines, mais suffisamment isolées pour pouvoir voguer sur les flots, renifler la forte odeur d’iode, pêcher et manger du poisson à tous les repas et planter ma tente sur un nouveau territoire chaque jour. Je pense que nous sommes tous d’accord pour dire que c’est là l’essence même du kayak de mer. Seulement, certains d’entre nous hésitent à s’engager dans une randonnée longue :

  • vais-je penser à tout ?
  • cela m’est-il accessible : physiquement ? moralement ?…

En été 2004, avec ma camarade Evelyne, nous avions décidé de changer de secteur de navigation, et, après les pays anglo-saxons, nous avons choisi la Norvège comme destination. Il m’a semblé que ce pays et notamment les fjords de Bergen étaient un endroit idéal pour ceux qui voudraient se lancer dans une première grande randonnée en kayak et en autonomie complète. Aussi je vous propose quelques indications et conseils pour réussir votre voyage à travers cet article.

Pourquoi la Norvège ?

Tout d’abord pourquoi ce secteur de la Norvège se prête-t-il à une première randonnée ? Parce qu’il est très protégé et présente très peu de courants de marées : on peut faire une longue navigation sans avoir à affronter des mers difficiles ; il n’y a pas de pointes parfois délicates à passer et on peut à tout moment se poser sur une île ; on n’est jamais vraiment isolé : il y a toujours des habitations à proximité et en cas de « pépins », un retour aux véhicules est toujours très aisé. Et pourtant, malgré tout cela, on est vraiment toujours dans une ambiance de rando, avec l’impression d’être seul au monde et de profiter pleinement de la nature qui nous entoure. Vraiment une bonne idée pour une première expérience un peu longue avant de s’aventurer dans des pays et des mers plus difficiles.

La préparation

Lorsqu’on a décidé de la destination, il s’agit de savoir comment s’y rendre.

Grâce à l’internet, préparer son voyage est devenu un jeu d’enfant. Pour nous rendre en Norvège, nous avions pris l’option route, à savoir la remontée de l’Allemagne, la traversée du Danemark, puis le ferry pour la Norvège : départ de Hirtshals au Danemark, arrivée à Kristiansand en Norvège.

Pour réserver un ferry dans toute l’Europe, le site www.ferry.com est d’une utilisation très facile.

Cependant, aujourd’hui, si je devais retourner en Norvège, je privilégierais sans doute le trajet par l’Angleterre ; cela est plus onéreux mais on y gagne deux à trois jours de voyage entre l’aller et le retour, donc on économise beaucoup de fatigue et de kilomètres à la voiture ( Paimpol- Bergen : 2 500kms !)

Ensuite il faut vite se procurer les cartes pour que le voyage puisse commencer en rêve. Moi, je les achète habituellement dans une librairie nantaise du nom de l’Astrolabe.

Une fois les cartes dépliées, on peut déjà élaborer un ou des itinéraires possibles, en fonction des abris, des points d’eau, des ports, des distances entre chaque étape, des particularités ou des sites remarquables à voir ou à ne pas manquer.

Il ne faut pas oublier de prendre en compte les particularités maritimes du secteur. En règle générale : courants, passages de pointes exposées à la houle, hauteur d’eau pour certains passages ou atterrissages). Pour les fjords de Bergen, ce dernier point est négligeable, d’où une des facilités de cette rando.

Puis, à deux ou trois semaines du départ, commence la préparation matérielle de la rando. C’est sans doute cette partie pratique qui peut intéresser les nouveaux pratiquants de la « grande rando » car le risque est de mal évaluer ce qui est indispensable, essentiel et ce qui est seulement superflu.

Depuis des années, je me suis constitué une liste, que j’améliore ou modifie chaque année. Il faut garder en tête quelques principes :

  • éviter de se charger de choses inutiles,
  • être rationnel sans pour autant être spartiate !

Donc je vous soumets cette liste qui n’est pas LA LISTE du randonneur mais uniquement la mienne, celle avec laquelle je fonctionne depuis pas mal de temps.

Liste matériel et nourriture pour 15 jours de rando kayak

L’ALIMENTATION

Quelque soit la rando, je pars toujours avec la totalité de la nourriture ; sauf évidemment pour les mers chaudes, ou les voyages en avion. Pour quelles raisons ? Tout d’abord  car je ne veux plus, une fois parti, mettre les pieds dans une grande surface, parce que on n’est pas certain d’en trouver une ni même une épicerie, et ensuite parce qu’ en Irlande une pomme Golden coûte plus d’un euro et presque deux en Norvège.

Voici donc quelques indications pour constituer une liste de courses pour 16 jours de rando et deux personnes :

  • Matin :
    • semoule fine de blé dur (menu du matin indispensable pour ne pas avoir un creux à 11heures) : 1,5 kg
    • flocons d’avoine : 1kg
    • thé : 50 sachets
    • café (un seul buveur) : 750 g
    • confiture conditionnée dans trois pots de miel vides : 900 g
    • raisins secs : 2x250g
    • lait en poudre : pour environ 15 litres
    • sucrettes : 1 boîte (conditionnée dans une boite pellicule photo)
    • beurre : 2x250g

La semoule, les flocons d’avoine, le lait et le café sont conditionnés en bouteilles d’eau en plastique préalablement séchées : cela a l’avantage d’être léger, pas fragile, étanche, de se ranger plus facilement dans les pointes du bateau et on peut se débarrasser des bouteilles vides au fur et à mesure.

  • Céréales : (midi et soir)
    • Soit 5.5 kg de riz, blé, taboulé, boulgour, coquillettes, crozets de Savoie, lentilles …
    • Plus 6 sachets de purée.
    • 10 pains de type pain allemand (kornbrot) : brun, de forme rectangulaire, complet et prétranché.
    • 1 pain pèse 500g et contient 7 tranches.

Prévision approximative : 100g/pers/repas (midi et soir). Donc, puisque cette fois nous sommes deux, nous avons conditionné les céréales par repas (200g) dans des sachets congélation.

  • Midi :
    • soupes individuelles instantanées : 28 sachets (en cas de très mauvaise météo)
    • thon : 2 boites de 100g
    • maquereaux : 2 boites de 100g
    • chocolat : (indispensable !) : 6 tablettes
    • vinaigrette : 1 litre
    • olives : 400g
    • fromage (comté) : 1kg
    • épices : basilic, curry, sel, poivre (en boîtes à pellicules photos)
    • Carottes : 8
    • Oignons : 500g
    • Tomates : 16
    • Courgettes : 8
    • Ail : 2 têtes
    • Pommes : 2 kg

Pour les repas de midi, le menu est toujours identique à savoir une salade à base de céréales (surtout) et de légumes (un peu) dans laquelle nous rajoutons le plus souvent du poisson issu de la pêche, ou du thon en boîte ou maquereaux à la moutarde. Puis un morceau de pain, un bout de fromage, une demi-pomme et quelques fruits secs en dessert.

Nous préparons toujours la salade le matin avant de partir. Ainsi, à midi, on peut se ravitailler rapidement, sans se refroidir trop longtemps : la thermos est toujours pleine d’eau chaude, cela a aussi l’avantage de pas avoir à sortir trop de choses des caissons.

Pour les salades du midi : 1/2 courgette, 1 tomate, 1 petit oignon, une gousse d’ail, 1/2 carotte.

  • Soir :
    • soupes déshydratées : 11 sachets
    • cubes or : 1 boite
    • cacahuètes : 500g
    • pâtés, rillettes, pâté de foie : 6 petites boîtes au total
    • sardines, foie de morue : 5 boites au total
    • sauce tomate : 1 tube
    • saucisson sec :  2x250gr
    • riz au lait déshydraté :  4 sachets
    • flans au chocolat : 5 sachets
    • flans vanille : 5 sachets (pour les flans : 1 sachet pour 1/4 litre et pour 2 pers)

Le soir, il y a souvent beaucoup de poissons à cuire, plus le dessert à préparer, tout cela avec un seul feu et une seule gamelle, alors souvent on opte pour une « soupe complète » : soupe, nouilles …, poisson, tout ensemble.

  • Encas : (fatigue, mauvais temps …)
    • fruits secs : bananes, abricots, figues, pruneaux : 500g de chaque.
  • Divers :
    • Sacs poubelles, éponge scotch brite, gratton métallique
    • Essence C (pour le réchaud) : 10 litres
    • 2 récipients plastiques de 2litres pour la salade et pour le poisson
    • 1 litre de rhum brun pour le grog du soir et un de rhum arrangé pour l’apéro
    • Le vin en bidon, en fonction de la place restante et de la soif de chacun.

A ces courses, il faut ajouter les courses pour la route qui seront mises à part et facilement accessibles dans la voiture.

LES VETEMENTS

Il faut bien se rendre à l’évidence que toute cette nourriture occupe énormément de volume et c’est donc sur les vêtements que l’on peut facilement gagner de la place, non pas en passant les soirées en short et en tee-shirt, mais en choisissant des vêtements très légers et très efficaces contre le froid et surtout l’humidité.

Voici donc une proposition de liste :

  • Pour le soir :
    • 1 caleçon polaire, 1 pull laine (extra)
    • 1 vêtement polaire léger, 2 tee-shirts et 1 gilet en polaire, 3 slips, 3 paires de chaussettes, 1 cagoule polaire (contre le froid mais surtout contre les éventuels moustiques), un ensemble ciré (haut et bas),
    • une paire de bottes,
    • 1 serviette de toilette polaire, 1 gel douche (odeur noix de coco pour se croire sous les tropiques !).
  • Pour le kayak :
    • tee-shirt polaire ou pull laine, gilet sans manches, blouson, caleçon long et fin (polyester), pantalon ciré,
    • bottillons,
    • chapeau, lunettes, crème solaire, baume pour les lèvres.

LE MATERIEL DE RANDO

Sur ce matériel, on peut aussi économiser beaucoup de place en ne prenant que l’essentiel et surtout en évitant de prendre du matériel faisant double usage.

  • Cuisine : réchaud de type MSR, essence C (10 l), 1 gamelle inox de 4 litres, une cuiller en bois, une louche, un torchon (appelé en breton bouchou strouille), une thermos de 1litre, sa gamelle, ses couverts, son couteau, son gobelet, des briquets !
  • Pharmacie :

La liste peut varier suivant les individus et suivant les destinations.

Il faut des antibiotiques génériques, des anti-inflammatoires, des décontracturants contre les douleurs de dos par exemple (myolastan très efficace), collyre, compeed, steri-strip, de la biafine et du tulle gras car le seul accident que j’ai rencontré au cours d’une rando c’est une brûlure à l’eau bouillante renversée sur la cuisse ( d’où l’intérêt de mettre son pantalon de ciré lorsqu’on cuisine), il faut également prévoir une excellente pince coupante qui servirait dans le cas précis d’un hameçon planté dans un doigt. Pour les mers chaudes, il faudra rajouter ercéfuril, imodium, parfénac.

  • Matériel sécu :

La liste est connue et est strictement la même que pour nos sorties à la journée.

Il ne faut pas hésiter à prendre plus de matériel de sécu, personnellement, j’ai des feux de détresse sur le bateau mais aussi dans mes poches de gilet, car si jamais je me retrouvais à l’eau et si mon kayak partait avec le vent…, j’ai aussi un excellent sifflet bien strident et des feux parachutes, à quoi il faut ajouter de quoi prévoir une réparation de bateau : syntofer, scotch…

J’ai aussi un dictaphone qui me permet d’enregistrer le bulletin météo donné à la VHF et de le réécouter afin de bien le comprendre.

  • Autre matériel :

La liste des vivres qui est donnée dans cet article implique obligatoirement un complément fourni par la pêche. Il faut donc aussi s’équiper de matériel de pêche, penser à prendre du matériel de rechange en cas de casse, avoir sur le pont du bateau un couteau de pont, et un filet de pêche ou mieux un sac en toile de jute. Que ce soit en Norvège, ou dans les pays anglo-saxons, la pêche est très facile et rares sont les journées de bredouille. Le risque de bredouille est surtout lié à la météo : trop de vent pour tirer une ligne, ou impossibilité d’aller sur l’eau (d’où les boites de thon et de maquereaux). Le poisson pêché est surtout du lieu jaune (très gros), et des maquereaux. Mais on peut aussi pratiquer la récolte de bigorneaux, de moules, de coques, de palourdes… de myrtilles en Norvège.

LA RANDONNEE

On y est, c’est le jour du départ, les bateaux sont solidement fixés sur la galerie, la voiture est pleine à craquer (on peut aller jusqu’à trois personnes par auto, quatre cela devient très problématique). Une fois arrivé sur place, il faut tout de suite vérifier que l’endroit choisi sur la carte pour le départ est vraiment comme on l’avait imaginé, ensuite c’est le chargement, et l’angoisse…comment embarquer tout ce bazar qui recouvre le quai d’embarquement ou la plage ? Mais oui tout entre à l’intérieur du bateau ! Mais il faut bien se rappeler qui transporte quoi et où on a rangé le café ou le sucre (personnellement, j’ai arrêté de sucrer le café en commençant la rando en kayak !).

Pour charger mes caissons, j’essaie de privilégier le caisson arrière pour mes affaires perso, la tente, les bâches, le caisson avant est réservé au réchaud, gamelle, nourriture ; dans les pointes je coince les bouteilles d’essence, les bouteilles plastiques de lait, de semoule…

Reste l’eau : il faut savoir, qu’à deux, il nous faut environ  7 à 8 litres d’eau par jour, donc nous partons avec 3 bidons de 5 litres que nous chargeons entre nos jambes, puis nous chargeons des bouteilles plastiques derrière le siège, ces bouteilles étant une réserve, il est donc nécessaire de faire le plein d’eau tous les 2 ou  3 jours en tenant compte de la réserve et cela sans se restreindre. Dans le troisième caisson, je mets la thermos, les encas, la trousse de pharmacie, les documents concernant la navigation, les papiers…

Les bateaux sont pleins à craquer et très lourds !!! Reste encore une chose à faire : laisser dans la voiture un message visible expliquant votre projet, l’itinéraire prévu, et la date du retour.

Si cela est possible, il est préférable de prévenir quelqu’un, un habitant du lieu, un patron de pub voisin, pour savoir si la voiture ne va pas gêner. Il arrive parfois que l’on vous propose de mettre votre véhicule chez un particulier, ainsi vous pouvez partir en toute sérénité.

Même si vous partez pour une circumnavigation, veillez à laisser votre voiture à un endroit facile à rejoindre par la route car, il faut pouvoir regagner la voiture facilement soit en stop ou en bus en cas de blessure, mauvais temps, fatigue. Dans le cas de la région de Bergen, choisissez un endroit central, ainsi vous pourrez revenir facilement au point de départ et réajuster votre équipement et cela sans repasser par le même circuit.

Place au voyage et à l’évasion, faites un journal de bord soit par écrit, soit par dictaphone, prenez des photos, car vous aurez un immense plaisir à revivre la rando durant l’hiver suivant.

A titre indicatif, je vous livre le budget de trois semaines de vacances en Norvège, dont seize jours de navigation : ferry 166 euros par pers ; courses, photos, essence, péages, cartes etc… 466 euros par pers, soit au total 632 euros sans le rhum et le vin ! BONNE RANDO !


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